Le deuil : définition et symptômes
Qu'est-ce que le deuil?
A l’origine, le deuil désigne le sentiment de tristesse intense ressenti par un individu à la suite de la mort d’un être cher. Par extension, on englobe sous ce terme l’ensemble des manifestations psychologiques, comportementales et culturelles qui suivent la perte du proche.
Par un glissement de sens, on parle aussi de deuil pour désigner d’autres pertes douloureuses, comme une rupture amoureuse ou un divorce.
Le deuil est un processus naturel. Il est tout à fait normal de ressentir du chagrin suite à une perte importante. En revanche, il devient pathologique lorsque la détresse ne diminue pas au cours du temps, et qu’elle entrave le bon fonctionnement de la vie quotidienne. Pour surmonter un deuil plus facilement, il est possible d'avoir recours à l'hypnose.
Les différents types
Ainsi, le DSM-5 fait la distinction entre deuil normal, compliqué et pathologique.
- Le deuil normal se déroule en trois phases, et dure moins d’un an. A la phase de choc initial et d’incrédulité, succède une phase de dépression qui n’excède pas quelques mois. Enfin, la phase de réorganisation se caractérise par une acceptation de la perte. Les fonctions normales de la vie quotidienne sont progressivement réinvesties.
- Le deuil compliqué ou trouble du deuil compliqué persistant, se définit par des symptômes forts, avec une incapacité fonctionnelle au quotidien. Il s’étend sur une durée supérieure à 12 mois, et se manifeste entre autres par des souvenirs intrusifs, des poussées de chagrin, ou au contraire un déni profond. Le deuil compliqué, s’il n’est pas pris en charge, peut déboucher sur une dépression.
- Enfin, le deuil pathologique est un véritable trouble psychiatrique. Il se caractérise par une dépression profonde, et des signes de déni de la réalité qui s’apparentent au délire. Des comportements bipolaires et hallucinations peuvent apparaître, ainsi que des addictions (alcool, tabac). Parfois, il s’accompagne de manifestations physiologiques, comme des ulcères ou même la déclaration d’un cancer.
Symptômes physiques
La tristesse du deuil entraîne un certain nombre de symptômes physiques. Ceux-ci peuvent apparaître dès l’annonce du décès, ou pendant la phase de dépression. Les symptômes les plus courants sont :
- Une sensation de froid et des tremblements
- Des bouffées de chaleur
- Des douleurs musculaires et articulaires
- Une perte d’appétit et des troubles digestifs
- Une fatigue chronique ou des insomnies
- Des maux de tête
- Des vertiges et palpitations
- Une hypertension artérielle
Traitements
En plus de l'hypnose, il existe de nombreux traitements thérapeutiques et psychologiques, pour faciliter le travail de deuil.
Accompagnement psychologique
Le deuil est toujours difficile à vivre. En général, c'est l’entourage de la personne qui assure la tâche de soutien psychologique, en apportant écoute et réconfort jusqu’à estompement de la douleur.
Cependant, lorsque celui-ci s'installe dans la durée, un accompagnement extérieur, en psychothérapie, doit être envisagé. Parmi les choix thérapeutiques possibles, la psychothérapie comportementale et cognitive est la plus recommandée. En effet, elle permet de déconstruire les croyances autour de la mort, et les pensées irrationnelles qui renforcent la souffrance.
La psychanalyse est une autre option possible, lorsque le deuil fait remonter des problématiques plus profondes : remords, relation conflictuelle avec la personne décédée, transgénérationnel…
Thérapies brèves
Pour ceux qui ne souhaitent pas s’engager dans une longue psychothérapie, et dont les manifestations du deuil restent modérées, les thérapies brèves sont une autre option. Elles permettent d’atténuer rapidement les symptômes et de mieux gérer les émotions, en seulement quelques séances.
Par exemple, les thérapies psychocorporelles comme la sophrologie, peuvent aider à diminuer les symptômes physiques. L’EMDR, qui se sert des mouvements oculaires, est très efficace pour le traitement du stress post-traumatique associé au deuil.
Enfin, l’hypnose est une autre approche très pertinente pour l’accompagnement au deuil. En état modifié de conscience, elle permet de travailler en profondeur sur les représentations et émotions associées au défunt. Cela permet d’accepter la perte douloureuse, en mobilisant vos propres ressources inconscientes.
Médicaments
Dans certains cas, votre médecin généraliste peut vous prescrire des médicaments, pour mieux traverser cette période difficile. Ces traitements sont utiles si vous devez être opérationnel rapidement après le décès (contraintes familiales ou professionnelles). Trois familles de médicaments peuvent être indiquées pendant le deuil :
- Les anxiolytiques (anxiété et difficultés à s’endormir)
- Les somnifères (troubles du sommeil)
- Les antidépresseurs (états dépressifs)
Le médicament est un outil, une béquille qui permet de mieux gérer les symptômes. Il ne remplace pas l’accompagnement psychologique indispensable en cas de deuil prolongé.
Efficacité de l’hypnose
D’après la psychiatre Elisabeth Kübler-Ross, le deuil est un processus qui se fait naturellement, suivant ces sept étapes : choc, déni, colère, tristesse, résignation, acceptation et reconstruction. Ces états émotionnels successifs sont naturels, et permettent un retour à la normale. L’objectif de l’hypnose pour le deuil n’est donc pas d’interférer avec eux, mais d’aider à mieux les traverser. Si une de ces étapes est particulièrement difficile à vivre, l’hypnose peut débloquer et relancer le processus.
Deuil traumatique
Les premières recherches sur l’utilisation de l’hypnose dans le cadre du deuil datent des années 1980.
En 1981, une recherche américaine s’est par exemple intéressée à l’hypnose pour aider des vétérans de la guerre du Vietnam à surmonter différentes pertes1. Cinq ans plus tard, une étude de cas montre l’efficacité de la visualisation sous hypnose pour traiter le traumatisme associé au deuil2. Une autre étude de cas, parue en 1988, détaille une méthode thérapeutique utilisant l’hypnose pour accélérer le passage d’une phase du deuil à une autre3.
Ces recherches constituent des prémisses. Réalisées sur un faible nombre de participants, leurs résultats ne sont pas généralisables. Aussi, elles sont surtout centrées sur la gestion à court terme du deuil, dans son aspect traumatique (choc et stress post-traumatique4.
Les différentes étapes et la reconstruction
Or, dans sa logique et sa prise en charge thérapeutique, cette période du deuil se distingue de celle à plus long terme, qui consiste à gérer la perte pour revenir à une vie normale. Il existe d’ailleurs deux termes distincts, en anglais, pour désigner ces deux périodes : “grief”, qui désigne le choc initial suite à la nouvelle du décès ; et “mourning”, qui désigne tout le processus d’intégration et de reconstruction suivant le choc.
D’autres études ont évalué l’efficacité de l’hypnose pour l’accompagnement au deuil à plus long terme.
Par exemple, dès 1982, une étude de cas montre l’efficacité d’une pratique quotidienne de l’autohypnose sur une femme ayant récemment perdu son compagnon. D’après son carnet de bord, un mois a suffi pour qu’elle traverse les trois grandes phases du deuil (choc, état dépressif et réorganisation) avant de retrouver une vie normale5.
En 1999, une étude américaine propose un modèle complet pour l’accompagnement aux différentes phases du deuil en hypnothérapie6. La démarche est la suivante :
- Pendant la phase de choc, des techniques de relaxation et de renforcement du moi sont utilisées. L’objectif est d’aider le patient à retrouver son calme et mobiliser ses ressources intérieures
- Pendant la phase de dépression, le travail thérapeutique est centré sur la relation au défunt. Grâce à des suggestions hypnotiques, pouvant notamment influencer les rêves, le patient est amené à redéfinir le lien qui l’unit à la personne disparue, et à intégrer le changement.
- Enfin, pendant reconstruction, les suggestions guident la personne vers un détachement de la relation, et la formation de sa nouvelle identité sans le défunt.
Les recherches portant spécifiquement sur l’aide au deuil en hypnose sont relativement rares. Cela s’explique entre autres car c'est un sujet complexe, qui recoupe plusieurs problématiques : notamment le traumatisme et la dépression. Ceux-ci ont au contraire fait l’objet de nombreuses études ayant démontré l’efficacité de l’hypnose7 8 9.
Stratégies thérapeutiques
L’accompagnement au deuil en hypnose requiert quelques précautions. Les thérapeutes conseillent généralement d’attendre quelques mois entre le décès et la première séance, afin que les premières étapes du deuil se fassent le plus naturellement possible.
Ensuite, le travail thérapeutique se fait essentiellement selon trois axes : le traitement du souvenir traumatique, un travail sur les relations, et un travail sur les émotions.
Traitement des mauvais souvenirs
Une grande majorité des deuils s’accompagnent de mauvais souvenirs. C’est le cas par exemple lorsque le proche est décédé d’une maladie : l’image de la souffrance prend le pas sur les autres souvenirs, causant traumatisme et anxiété. Dans certains cas, comme un assassinat ou un suicide, le traumatisme lié au souvenir est particulièrement fort.
Or l’hypnose, qui travaille sur les représentations inconscientes, est un outil efficace pour modifier ou effacer un souvenir traumatique. Dans le cadre du deuil, il s’agira de remplacer progressivement les images de maladie ou de violence par des souvenirs plus agréables de la personne disparue.
Travail sur la relation
Ensuite, une autre part importante du travail en hypnose concerne la relation au défunt. L’objectif est d’accepter que la relation ait changé, mais aussi de recadrer les croyances et les perceptions pour neutraliser regrets, culpabilité et autres sentiments bloqués. Il est également fréquent en hypnose de faire un travail symbolique de pardon, nécessaire pour l’acceptation.
L’hypnose est un outil puissant pour modifier les représentations et les émotions associées à un souvenir ou à une relation. Son principal atout est d’opérer ces changements à un niveau inconscient, grâce à des techniques de régression et de recadrage. Cela permet de changer durablement de regard sur une situation donnée, en l’occurrence votre vécu avec le défunt.
Gestion des émotions
Enfin, l’hypnose dispose de techniques efficaces pour identifier et traiter les émotions. Pour l’accompagnement au deuil, il s’agira surtout de gommer la tristesse, la colère ou encore la culpabilité, afin de cheminer vers l’acceptation et la résilience.
Parfois, il arrive que les émotions liées au deuil ne soient pas conscientes. Elles génèrent alors des comportements aussi inexplicables que désagréables. Le rôle de l’hypnose est d’identifier ces émotions inconscientes, pour les libérer.
Durée de la thérapie
Le deuil étant un processus long, il est difficile d’estimer le nombre de séances d’hypnose nécessaires pour le surmonter. Cependant, l’hypnose agit rapidement ; des changements peuvent donc être constatés dès les 2 ou 3 premières séances.
Contre-indications
En cas de deuil pathologique, surtout si celui-ci s’accompagne de bouffées délirantes, mieux vaut consulter un médecin. En effet, l’hypnose est contre-indiquée aux personnes souffrant de troubles psychiatriques dissociatifs (schizophrénie, paranoïa, trouble bipolaire).
Questions fréquentes
L'hypnose est-elle efficace pour surmonter un deuil ?
Le deuil est un processus naturel. Cependant, en cas de deuil prolongé, l'hypnose est une solution de choix pour en traverser plus facilement les étapes.
Comment l'hypnose traite-t-elle le deuil ?
En hypnose, l'accompagnement au deuil se fait suivant trois axes de travail :
- Traitement des mauvais souvenirs
- Travail sur la relation
- Transformation des émotions
Y a-t-il des contre-indications ?
Lorsque le deuil s'accompagne de troubles psychiatriques (dissociation, délires), il est recommandé de consulter un médecin.
- 1: David Spiegel M.D. (1981) Vietnam Grief Work Using Hypnosis, American Journal of Clinical Hypnosis, 24:1, 33-40, DOI: 10.1080/00029157.1981.10403281🔗 https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00029157.1981.10403281
- 2: Mary S. Cerney PhD (1986) Imagery and Grief Work, The Psychotherapy Patient, 2:1, 35-43, DOI: 10.1300/J358v02n01_05🔗 https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1300/J358v02n01_05
- 3: Yager, E. K. (1988). Working through grief with hypnosis. Medical Hypnoanalysis Journal, 3(3), 84–88.🔗 https://psycnet.apa.org/record/1989-20032-001
- 4: Spiegel, D. (1988). Dissociation and hypnosis in post‐traumatic stress disorders. Journal of traumatic stress, 1(1), 17-33🔗 https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/jts.2490010104
- 5: Fromm, E., & Eisen, M. (1982). Selfhypnosis as a therapeutic aid in the mourning process. American Journal of Clinical Hypnosis, 25(1), 3-14.🔗 https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00029157.1982.10404059
- 6: Elkins, G. R. (1999). Hypnosis, Grief and Mourning. Hypnos, 26, 61-69.🔗 https://www.researchgate.net/profile/Darryl_Maybery/publication/298533769_Hypnosis_in_a_case_of_vocational_counselling/links/57046b1b08ae44d70ee0636e.pdf#page=67
- 7: William N. Friedrich (1991) Hypnotherapy with Traumatized Children, International Journal of Clinical and Experimental Hypnosis, 39:2, 67-81, DOI: 10.1080/00207149108409621🔗 https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00207149108409621
- 8: Edwards, L. A. (2002). Body-oriented hypnotherapy: Releasing preverbal trauma. Australian Journal of Clinical Hypnotherapy and Hypnosis, 23(1), 31.🔗 https://search.proquest.com/openview/53106a5f9791442fd0adae59a856889d/1?pq-origsite=gscholar&cbl=30864
- 9: Assen Alladin (2010) Evidence-Based Hypnotherapy for Depression, International Journal of Clinical and Experimental Hypnosis, 58:2, 165-185, DOI: 10.1080/00207140903523194🔗 https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/00207140903523194