Hypnose et troubles sexuels

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L'hypnose thérapeutique est efficace pour améliorer les troubles sexuels. Pourquoi est-elle efficace ? Quelles sont les stratégies thérapeutiques ? Quelles sont ses applications pratiques ? Qu'en est-il de l'autohypnose ?

Présentation

Photo représentant une première séance d'hypnose pour les troubles sexuels.

L’hypnothérapie ou hypnose thérapeutique comprend plusieurs dimensions particulièrement bénéfiques en sexologie, pour traiter les troubles sexuels1‌ :

Elle génère une relaxation corporelle et a une action anxiolytique.

Elle agit au niveau des pensées négatives avec un recadrage par des pensées et suggestions positives aboutissant à une modification des schémas comportementaux et émotionnels. Elle permet ainsi de rompre le cercle vicieux de l’échec par anticipation induit par les pensées négatives.

Par le biais des mémoires corporelles, elle recrée un contexte favorable au désir et au plaisir.

Elle met à jour des ressources inconscientes que le sujet pourra utiliser à son bénéfice.

Elle s’associe parfaitement à la relaxation et aux prises en charge sexothérapiques avec lesquelles elle peut s’inscrire dans une continuité thérapeutique souple et logique, en s’adressant à une même entité psychocorporelle.

Les mêmes principes s’appliquent à l’hypnothérapie avec un thérapeute et à l’autohypnose sur soi-même.

Qu’est-ce que l’hypnose thérapeutique ?

Elle implique un état de conscience modifié, situé entre l’état de veille et le sommeil, dans lequel le rôle du conscient est réduit et l’inconscient libéré du contrôle du conscient.

Je préfère utiliser le terme d’hypnothérapie qui qualifie plus justement la forme thérapeutique par rapport au terme plus vaste d’hypnose, qui intègre également les procédés hypnotiques dits « classiques » ou « de spectacle », dont elle très éloignée.

La forme thérapeutique, ou hypnothérapie, caractérise son utilisation dans un cadre de soins et de relation d’aide.

Elle s’appuie essentiellement sur les travaux de Milton Hyland Erickson qui ont abouti à la technique dite de l’hypnose ericksonienne, spécifique de son application dans la relation d’aide et de soin, notamment employée pour le traitement des troubles sexuels. L’hypnothérapeute ne donne pas les solutions, il procure en revanche au patient les conditions favorables pour l’émergence de solutions propres au sujet et venant de ses propres ressources1.

Différences entre l'hypnothérapie et la forme non thérapeutique

L'hypnose ericksonienne :

  • Le thérapeute est au même niveau que le patient, il y a des échanges. Il ne fait qu’activer des capacités d’auto-guérison déjà présentes chez le patient.
  • Le sujet participe activement à la séance, il n’est pas dans un état d’acceptation passive. Il ne perd pas conscience et met lui-même en lumière les ressources qu’il va utiliser pour induire un changement en lui.
  • L’état modifié de conscience hypnotique est un phénomène psychique naturel. Il ne s’agit pas de magie.
  • Le patient entre lui-même en état hypnotique et seulement s’il le souhaite, s’il est d’accord pour la séance.
  • Il s’agit d’un état de veille et non de sommeil.
  • Le thérapeute n’est pas intrusif et respecte les désirs du sujet, ainsi que les objectifs qui ont été préalablement déterminés avec le patient.
  • Les suggestions formulées ne sont que des suggestions que le patient peut accepter ou refuser.
  • On parle de phénomène naturel, de corps et d’inconscient.

Au contraire, dans l’hypnose dite classique ou de spectacle 2 :

  • L’hypnotiseur est dans une position de pouvoir, il est directif, autoritaire.
  • Le sujet est passif.
  • On parle de magie, de sommeil.
  • Les suggestions sont remplacées par des injonctions, des ordres.

Quelques rappels essentiels

Beaucoup d’idées fausses circulent à son propos. Il est donc important de préciser que3 4 :

  • Le sujet reste conscient pendant la séance d’hypnothérapie. Il se trouve toutefois plus dans une sensation d’être spectateur assistant à la séance.
  • Le patient peut interrompre la séance à tout moment, il conserve la maîtrise de son comportement. On ne peut pas « manipuler » un sujet sous hypnose et lui faire faire des choses contre son gré, ses convictions ou ses croyances.
  • L’hypnothérapeute ne fait qu’accompagner le sujet et s’assurer que le travail réalisé est conforme aux objectifs thérapeutiques fixés.
  • Les suggestions formulées par le thérapeute sont issues d’une séance préalable avec le patient. L’état hypnotique n’abolit pas la critique. Aucune suggestion ne peut contraindre le sujet à ce qu’il ne souhaiterait pas. Le sujet a toujours le choix durant la séance d’accepter ou de refuser les suggestions formulées par le thérapeute.
  • Ce n’est pas un traitement miracle agissant en une séance. Il s’agit d’un travail fait en partenariat avec l’hypnothérapeute, nécessitant l’accord du sujet et un apprentissage.
  • On ne peut pas ne pas se « réveiller » d’une séance d’hypnose. Même si l’hypnothérapeute ne sort pas le sujet de l’état hypnotique, le sujet en sort automatiquement comme on se réveille d’une sieste.
  • On ne risque pas de « perdre la tête » en hypnothérapie. Seules certaines pathologies psychiatres contre-indiquent cette technique thérapeutique.
  • Elle ne vise pas à remplacer un problème par un autre mais à modifier les comportements d’un sujet, en faisant appel à ses propres ressources positives expérientielles.
  • Elle ne permet pas de découvrir des souvenirs cachés refoulés. Elle permet en revanche de retrouver des émotions qui deviennent alors des ressources utilisées pour la résolution du problème présenté.
  • L’hypnothérapie ne fait pas revivre des souvenirs douloureux. C’est justement tout l’intérêt d’un des principes essentiels de l’état hypnotique qui est la dissociation entre corps et esprit.
  • Elle ne permet pas de modifier les capacités physiques ou sensorielles des individus, de se doter de « super pouvoirs ».
  • Elle n’aboutit pas à donner au sujet un fonctionnement « normalisé » et stéréotypé. Au contraire, chaque séance est différente selon les sujets et chaque sujet influe par sa personnalité sur les résultats obtenus.

Pourquoi a-t-elle sa place dans la prise en charge des troubles sexuels?

Particularités

L’hypnothérapie est une technique privilégiée en sexologie, dans la mesure où elle permet de s’adresser à la fois au corps et à l’esprit qui sont les deux acteurs indissociables de la sexualité humaine. De plus, tout comme la sexologie, elle concerne le sujet dans sa globalité et elles ont en commun5 :

  • L’abord de la dimension corporelle dans sa sensorialité et se présence dans l’ici et maintenant.
  • La prise en compte des dimensions affectives, relationnelles, imaginaires et érotiques.
  • L’importance de la relation de confiance entre le praticien et le patient.

Comme la sexualité, l’hypnothérapie est individuelle, non normative, laissant libre l’imaginaire du sujet, inventive et s’adaptant en permanence au sujet.

Une éducation rigide, une culture contraignante, des expériences sexuelles malheureuses, des échecs dus à une grande émotivité ou à une dysfonction sexuelle, un vécu négatif de son image corporelle, peuvent générer des blocages venant entraver la réalisation d’une vie sexuelle et sensuelle harmonieuse.

Il peut alors être nécessaire, au-delà des prises en charge sexocorporelles, de remonter à l’inconscient pour modifier des schémas comportementaux négatifs, venant entraver la sexualité et donc retentir sur les relations amoureuses.

L’hypnothérapie se propose alors de venir modifier au niveau inconscient ces schémas pathogènes, les images de soi négatives, les anxiétés inscrites profondément parfois.

L’état de conscience modifié induit par l’hypnose permet de mieux traiter les troubles sexuels ; localiser les blocages profonds et de leur substituer des schémas positifs axés sur le bien-être et les sensations corporelles agréables ressentis durant la séance. Les désirs s’expriment plus librement et les sensations corporelles les fixent avec les émotions ressenties en parallèle, modifiant les ancrages réactionnels et comportementaux.

Elle le fait d’autant mieux que si les émotions et les sensations se prêtent difficilement à un travail psychothérapique classique, elles sont particulièrement bien approchées par le travail analogique inconscient et par les métaphores, qui sont les objets du travail6.

Les procédés utilisés dans le traitement par l'hypnose des troubles sexuels font particulièrement appel aux métaphores, aux visualisations et à la prise de conscience associée du bien-être corporel ressenti.

Toutes les dysfonctions sexuelles féminines et masculines peuvent être abordées en hypnothérapie, à condition qu’une étiologie organique n’en soit entièrement responsable.

Le déroulement d'une séance

Le premier rendez-vous7 est réservé au recueil du problème du patient et à la fixation des objectifs thérapeutiques, sur lequel se fait un accord entre patient et hypnothérapeute.

Le thérapeute apporte également quelques explications sur le déroulement des séances. Ce premier rendez-vous, appelé « anamnèse », est à la base de la personnalisation de l’hypnothérapie de façon spécifique à chaque sujet en fonction de sa personnalité, de ses perceptions, du vécu de sa difficulté, de ses objectifs propres, de sa vie8, etc.

Une séance d'hypnose, pour traiter les troubles sexuels, se déroule de façon standardisée :

  • Une phase d’entretien centrée sur le symptôme, qui va être l’objet de la séance.
  • La phase d’induction de l’état hypnotique, suivi de la survenue de la dissociation entre corps et esprit.
  • La phase de travail hypnotique, également appelée phase de « perceptude » ou transe hypnotique. Les perceptions et les sensations sont vécues de l’intérieur mais observées avec recul par le sujet, en spectateur de lui-même.
  • La phase de retour dans la réalité présente, dans « l’ici et maintenant ».Le sujet revient à son état de conscience ordinaire, le travail réalisé s’intègre dans son esprit.

Durant toute la séance, le patient est guidé et accompagné par l’hypnothérapeute sans que celui-ci ne lui impose quoi que ce soit.

Une séance dure entre 30 et 60 minutes.

Le désir, l’état amoureux s’apparentent à un état hypnotique

On retrouve dans le désir et l’état amoureux des éléments de l’état hypnotique9 :

  • L’absorption : le sujet est complètement absorbé dans son désir, ses émotions et ses sentiments.
  • L’hypersuggestibilité : tout signe émanant de l’aimé agit comme un ancrage d’activation émotionnelle et de suggestion comportementale.
  • La dissociation psychique : le sujet perd le contact avec la réalité, quand elle contredit son désir et devient imperméable aux raisonnements extérieurs.

C’est après la rencontre amoureuse que le couple en formation sortira de l’état hypnotique pour entrer dans la phase de différenciation.

On retrouve également certaines caractéristiques hypnotiques dans le vécu de la sexualité10 :

  • Sensation de détente.
  • Absorption attentionnelle.
  • Suspension du contrôle conscient, lâcher-prise corporel et émotionnel.
  • Prise de conscience amplifiée des sensations corporelles.
  • Mise à distance de l’environnement.
  • Modification du sentiment subjectif de l’écoulement du temps.

Les leviers de la technique hypnotique dans les troubles sexuels

L’hypnose thérapeutique peut utiliser plusieurs leviers techniques, notamment envers plusieurs grandes dimensions des symptômes et troubles sexuels.

L’automatisation ou ancrage

L’automatisation d’un symptôme correspond à son passage de comportement réactionnel à un comportement réflexe dans une situation donnée. Ce passage à une réaction réflexe s’accompagne d’un renforcement du comportement symptomatique.

On parle aussi d’ancrage (ici négatif) entre un stimulus (ici la perspective d’un rapport) et un comportement ou une émotion, réactionnels (ici la peur d’un échec sexuel).

Ainsi un sujet ayant une difficulté sexuelle, trouble de l’érection ou éjaculation prématurée par exemple, va associer la crainte de ne pas arriver à une érection satisfaisante ou à retenir son éjaculation à l’apparition d’une anxiété réflexe au moment de l’acte ou même avant, et cette crainte va se transformer en angoisse d’échec réflexe, laquelle va pouvoir aller jusqu’à perturber son comportement amoureux dès la rencontre.

Cette angoisse réflexe va s’associer à des pensées négatives, dévalorisantes par exemple, fortement empreintes d’anxiété, qui vont amplifier ses peurs et ses appréhensions.

On peut utiliser la métaphore des ornières pour imager cet état d’anxiété paralysante, le sujet y tombant dès l’annonce d’une relation sexuelle et y restant prisonnier. Le principe de l’hypnose, pour traiter les troubles sexuels, sera alors de « déprogrammer » le stimulus « relation sexuelle » du réflexe « échec » en substituant dans l’inconscient du sujet les pensées négatives, par des pensées positives de plaisir et de maîtrise de son érection ou de son éjaculation.

On peut ainsi reprogrammer une autre automatisation à partir du même stimulus, en remplaçant le comportement réflexe pathogène par les apprentissages corporels, cognitifs et émotionnels appris en relaxation ou avec les techniques sexothérapiques.

La dissociation

Processus normal du psychisme rencontré dans le sommeil, l’endormissement, la concentration dans une activité, etc., la dissociation constitue une des bases de l’hypnothérapie et consiste en une rupture entre le corps et le conscient, laissant l’inconscient complètement réceptif aux messages sensoriels.

En dissociant les affects conscients négatifs des sensations corporelles, le sujet met à distance son problème de son ressenti émotionnel et établit le contact avec des sensations et des émotions présentes dans le réel sensoriel de l’ici et maintenant.

Cette dissociation, obtenue en hypnothérapie par l’induction, est la première étape d’une séance d’hypnose pour remédier aux troubles sexuels. Elle se traduit par l’apparition d’un état de conscience modifié ouvrant l’inconscient aux sens, dont les suggestions auditives inductrices de modifications des comportements réactionnels.

Les schémas comportementaux réactionnels conscients sont ainsi déconnectés du corps et l’inconscient est alors réceptif à leur modification.

Le sujet reprend le contrôle de son corps en court-circuitant les pensées négatives conscientes. On peut ainsi retravailler et amplifier les sensations corporelles et émotionnelles positives, lesquelles viendront désormais en réponse au stimulus sexuel.

Le lâcher-prise

Le lâcher-prise est une des conditions principales de l’envahissement par les sensations et le plaisir lors d’une rencontre érotique. Les anticipations et les pensées négatives en sont un des principaux obstacles.

Le travail en hypnothérapie permet de lever les barrières au lâcher-prise, de modifier la peur du lâcher-prise et du laisser-aller en la remplaçant par des sensations agréables en toute confiance en soi-même et en son corps.

Les suggestions et autosuggestions

L’hypnose thérapeutique, dans le cadre des troubles sexuels, repose également sur les suggestions de modifications comportementales, qui peuvent émaner du thérapeute ou du sujet lui-même en autohypnose.

Les suggestions ne sont proposées que pour faire émerger ses propres solutions par le patient, en puisant dans toutes les ressources expérientielles qui se trouvent dans son inconscient.

Par le biais de la dissociation, les suggestions et autosuggestions s’adressent directement à l’inconscient sans être filtrées par le conscient.

L’origine des symptômes réside en effet dans l’inconscient. On ne s’interdit pas consciemment d’avoir du plaisir, d’avoir une érection, etc.

On utilise des métaphores formées d’images, d’émotions, de situations dont l’inconscient comprend très bien le message symbolique caché, contrairement au filtre du conscient.

On peut comparer les réactions pathogènes liées aux stimuli sexuels à des autosuggestions négatives formulées par le sujet. L’hypnothérapie permet de remplacer ces autosuggestions négatives en les recadrant avec des suggestions positives amplifiées par le bien-être et les sensations corporelles, ressentis durant la séance d’hypnose pour traiter les troubles sexuels.

L’intérêt du couplage avec la relaxation et les sexothérapies

L’approche psychocorporelle est au centre des trois types de soins que sont la sexologie, la relaxation et l’hypnothérapie. Il en est de même pour la prise en compte de l’individu dans sa globalité.

Relaxation

Le couplage avec la relaxation se fait assez naturellement puisque les deux reposent sur un état de conscience modifié, associé à un état de détente et de bien-être.

La relaxation vient ajouter à l’hypnose son effet propre de réduction du stress et de l’anxiété, et donc de diminution des troubles sexuels.

L'hypnothérapie va venir surajouter son efficacité propre sur l'anxiété et les schémas émotionnels et comportementaux pathogènes.

Il faut d’ailleurs noter que ce couplage peut se faire d’autant plus simplement qu’une des méthodes d’induction de l’état hypnotique repose sur des contractions et décontractions musculaires. Par ailleurs, les deux techniques visent à se positionner dans l’ici et maintenant.

Il n’en demeure pas moins que l’association d’une séance d’hypnose doit répondre au processus spécifique de l’hypnothérapie avec en particulier l’entretien préalable avec le patient, la fixation d’objectifs bien identifiés et l’accord du patient.

Sexothérapies

Le couplage de l'hypnose avec les sexothérapies, dans le cadre des troubles sexuels, répond également à une logique thérapeutique dans la mesure où nombre de dysfonctions sexuelles sont liées à des schémas comportementaux bien ancrés dans l’esprit. L’hypnothérapie permet alors d’aborder la survenue du symptôme, en amont de sa constatation physique, et de modifier la réponse réflexe pathogène lors de la survenue du stimulus.

Elle permet également d’amplifier le message positif véhiculé par les sensations corporelles sexuelles et sensuelles.

Quelques applications pratiques de l’hypnothérapie en sexologie

Tout trouble sexuel qui se pérennise s’accompagne de l’élaboration par le sujet d’autosuggestions négatives de type hypnotique (autohypnose négative) à type de peur de l’échec, de culpabilité, d’embarras, de colère ou de honte venant remplacer les sentiments de désir, d’excitation, de plaisir, de satisfaction11.

  • Quelques exemples d’autosuggestions négatives : « je ne lui plais pas », « ce garçon ou cette fille est trop bien pour moi », « je ne vais pas y arriver », « elle ou il va vite en avoir marre de moi », « ça ne va pas marcher », « je vais avoir la honte », « je ne vais pas réussir à bander », etc.
  • Certaines autosuggestions négatives peuvent être d’ordre sensoriel et provenir de la mémoire sensorielle ou corporelle12 : une voix qui en rappelle une autre, une odeur de peau qui bloque, etc.

En ayant pour objectif de supprimer les suggestions négatives et de replacer l’esprit et le corps entier dans l’ici et le maintenant, l’hypnothérapie sexologique vise à remplacer la performance, les pseudo normes et le perfectionnisme sexuel par le lâcher-prise, la globalité des perceptions sensorielles et l’accueil de la surprise.

Les conditions préalables à sa pratique

  • Un bilan médical du trouble a été réalisé13, afin de s’assurer qu’il n’est pas exclusivement organique.
  • Le sujet ne souffre pas d’une maladie mentale contre-indiquant la pratique de l’hypnose pour les troubles sexuels (état psychotique par exemple).
  • La relation avec le ou la partenaire n’est pas excessivement conflictuelle. En cas de conflit notable, il conviendra de prendre en charge cette dimension avant d’aborder le symptôme sexuel en hypnothérapie.

Prise de conscience du corps sexuel et sensuel

En sexologie, elle vise d’abord à la prise de conscience du corps en tant que corps sexuel et sensuel14 15 :

  • Corps vivant et autonome (travail sur la respiration).
  • Corps sensoriel global.
  • Conscience de l’existence et de l’autonomie des zones érogènes et génitales.
  • Acceptation des sensations corporelles internes et externes, des sensations de plaisir.
  • Acceptation du lâcher-prise sur son corps et sur les sensations ressenties.
  • Passage du corps sensoriel au corps sensuel puis au corps érotisé et au corps sexuel.
  • Prise de conscience et intégration de l’accessibilité au corps de l’autre.
  • Respect du corps et des sensations de l’autre, altérité.

Elle s’attache donc aux dimensions de tension et détente, respiration, attention portée aux parties du corps, intégration corporelle globale, sensorialité, limites corporelles, avec l’objectif pour le sujet de s’approprier son corps dans ses dimensions sexuée et sexuelle. Ce n’est qu’après cette appropriation qu’un travail d’acceptation du désir et du plaisir, de la liberté et du partage, peut se faire16.

L’hypnothérapie sexologique est ainsi aussi un apprentissage de la tendresse.

Chez la femme

Chez les femmes, ce travail sur le corps sensuel et sexuel peut être particulièrement important tant peuvent fortes les pressions liées au corps objet de la maternité, de l’allaitement en regard de la dimension imaginaire, sexuelle et érotique qui implique des zones invisibles car corporellement internes, cachées. Et souvent le poids d’interdits éducatifs ou culturels ayant généré des conflits psychiques avec l’imaginaire érotique.

Pour les femmes souffrant de troubles sexuels, cet aspect corporel de l'hypnose est essentiellement sensoriel, permissif et métaphorique.

Cette prise de conscience corporelle s’associe à un recadrage des fréquentes idées fausses sur le corps, le plaisir, la sexualité.

On accompagne en général cette prise de conscience, notamment chez la femme, d’une information sur l’anatomie et la physiologie génitale.

Chez l’homme

L’homme est confronté à un idéal de masculinité représenté par la virilité corporelle et sa verge, visible extérieurement, facilement accessible, sans secret dans sa réalité physique17.

Cette visibilité externe en fait à la fois sa force pour s’affirmer en tant qu’homme, mais aussi sa faiblesse par la facilité symbolique de l’en priver (angoisse de castration).

Sa verge peut être autant la démonstration de sa virilité que la représentation de son insuffisance de puissance ou de désir.

C’est avec facilité que la pression sociale, les idées fausses, les rumeurs peuvent générer chez l’homme la peur de ne pas « être à la hauteur », en termes de virilité et une angoisse de performance.

L'hypnose peut, par le biais du processus de dissociation, permettre aux hommes de prendre du recul sur les suggestions négatives que peuvent engendrer les représentations sociales de la virilité, lesquelles peuvent être intériorisées sous la forme d’autosuggestions négatives et être la cause de troubles sexuels.

L’hypnothérapie visera en premier lieu à ce que l’homme prenne conscience de son corps sensuel et sexuel bien au-delà d’une sexualité réduite à son seul sexe, à être réceptif à l’ensemble de ses sensations corporelles. Il pourra ainsi ne plus être centré que le plaisir génital et apprendre à vivre la sexualité dans sa globalité, loin de la seule excitabilité de sa zone sexuelle.

A partir de là, comme pour la femme, le temps du plaisir érotique ne sera plus réduit à la brièveté du seul plaisir orgasmique et la prise en compte de la globalité corporelle intègrera également le corps de l’autre.

Troubles du désir

Le désir est une donnée éminemment variable selon les sujets et interactive en fonction du ou de la partenaire. Le travail sur la respiration et les visualisations basées sur ce que le patient considèrerait comme la situation idéale sont particulièrement utilisés18.

Les difficultés sexuelles de la femme

Une sècheresse vaginale incitera à travailler sur des métaphores se rapportant à des images d’hydratation comme par exemple associer le fait de manger des fruits gorgés de jus à la salivation et aux sensations de fraicheur ressenties. On associera ensuite des images corporelles puis vaginales.

En cas de troubles sexuels, tels que le vaginisme, un couplage relaxation et hypnose avec un travail centré sur la peur de la pénétration et sur la région périnéale et pelvienne apparait comme une prise en charge particulièrement opérante.

On y associera souvent une information sur l’anatomie génitale.

Les difficultés d’érection chez l’homme

Les dysfonctions érectiles traduisent en général, en l’absence de lésion organique causale, un symptôme d’angoisse qui peut relever de différentes origines psychologiques. Il peut s’agir d’anxiété dite de performance (crainte de ne pas « être à la hauteur »), de peurs (des femmes, de la grossesse, de maladies, etc.), d’attentes excessives (mariage, état amoureux, etc.), « excessives » s’entendant au moment présent, lors du rapport.

Bien souvent, les difficultés érectiles sont le fruit d’autosuggestions négatives19.

Un couplage relaxation et hypnose apparait ici être un bon choix, en cas de troubles de l'érection. La relaxation va permettre de réduire le stress lié à des attentes excessives ou à une anxiété de performance. L’hypnothérapie visera à modifier le cycle réflexe des autosuggestions négatives se déclenchant lors du stimulus.

Elle peut être associée sans risque à la prise de médicaments inducteurs de l’érection et d’autant plus que les difficultés érectiles ont entraîné une perte de confiance en soi, une anxiété de l’échec ou une désensibilisation érotique du sujet.

Les difficultés orgasmiques

Chez la femme, l’anorgasmie ou l’insatisfaction orgasmique traduit souvent un blocage intérieur envers l’accès au plaisir.

Pour ce type de troubles sexuels, l'hypnose peut être efficace.
L’hypnothérapie peut permettre de remonter au conflit intérieur ou aux peurs engendrant ce blocage et de « reprogrammer » un nouveau circuit de connexion entre le désir et le plaisir entre l’esprit et l’appareil génital.

Chez l’homme, il s’agit souvent d’orgasme survenant trop rapidement (éjaculation prématurée). On retrouve en général une anxiété d’anticipation de la précocité de survenue de l’éjaculation, une difficulté à se laisser-aller pour tenter de contrôler son éjaculation et des autosuggestions négatives de contrôle totalement incompatibles avec le lâcher-prise, qui permettrait de se positionner dans le présent du rapport.

Un couplage relaxation, sexothérapie et hypnose apparaît ici judicieux, en cas d'éjaculation précoce. La relaxation visant à se positionner dans l’ici et maintenant sans pensées négatives anticipatrices d’échec et à se focaliser sur les sensations corporelles agréables.

L'hypnothérapie dans le but de rompre les autosuggestions réflexes négatives en réponse au stimulus et en leur substituant des suggestions positives, les deux travaillant également sur une visualisation d’une sexualité satisfaisante, agréable et plaisante.

La sexothérapie pourra venir compléter le programme thérapeutique avec des exercices comportementaux spécifiques réalisés avec l’aide de la partenaire.

Epanouissement sexuel

La notion d’épanouissement sexuel20 traduit ce que chaque individu éprouve globalement de sa vie sexuelle. On peut traduire cette notion comme l’évaluation mentale globale de sa sexualité en termes de désir, de plaisir, de satisfaction résultant de ses expériences sexuelles.

Si le bilan est positif, le désir va se renouveler sans difficulté. En revanche si le bilan est négatif, si la vie sexuelle du sujet est ressentie comme globalement peu satisfaisante, le désir va perdre en intensité et aboutir à un désintérêt.

C’est ce qui peut survenir secondairement en cas de dysfonction sexuelle, l’insatisfaction après l’acte engendrant avec la répétition une insatisfaction profonde, prenant la place du symptôme initial dans la genèse du trouble. C’est aussi ce qui peut survenir avec l’habitude, avec les ritualisations des séances érotiques dans le couple.

Ce désintérêt pour la sexualité va évoluer vers une autohypnose négative réactivée lors de la confrontation à des stimuli érotiques.

Il ne servira alors à rien et l’effet sera même contre-productif de tenter une prise en charge des seuls symptômes sexuels, qui en seront devenus la conséquence.

Outre les troubles sexuels, l'hypnose sera alors le traitement de choix pour substituer un schéma de pensée positif aux autosuggestions négatives, en utilisant les ressources positives que le patient trouvera en lui lors des séances. Il développe ainsi des suggestions positives associées à des visualisations sexuelles positives et aux sensations corporelles de bien-être ressenties durant la séance.

Rééducation du périnée

Elle peut également constituer un apport bénéfique notable dans la rééducation périnéale, dont on connaît l’importance majeure en sexologie. Elle procure un confort d’exercice pour les patients et permet la reconnexion du sujet avec son périnée et les organes pelviens dont font partie les organes génitaux.

Elle permet aussi l’expression d’émotions intimes liées à la région périnéale, notamment des vécus douloureux qu’ils soient obstétricaux ou relèvent d’abus sexuels, et donc des déblocages d’émotions réfoulées21.

L'hypnose est donc efficace pour ce type de troubles sexuels.

En couple

L’hypnothérapie peut être pratiquée avec un couple en se basant plus particulièrement sur le mode de fonctionnement du couple et son mode de communication.

Les deux partenaires sont remis en contact par le biais de la séance d’hypnose, ils partagent ensemble la détente et le bien-être ressentis lors de la séance et envisagent de nouvelles modalités de communication et d’échanges, qui permettent également de remédier à certains troubles sexuels.

L’autohypnose

Grands principes

Chaque individu éprouve tous les jours des états naturels d’autohypnose plus ou moins profonds sous la forme de rêveries, de concentration dans ses pensées, d’absorption dans un livre, etc., avec une perte de l’attention, d’absence au monde extérieur. Elle reproduit volontairement par soi-même et sur soi-même cet état hypnotique mais sous la forme d’une activité dirigée par soi avec un objectif donné22.

Ellepermet au sujet de se réapproprier la technique hypnotique et favorise son autonomie, ce qui est un des objectifs de la prise en charge thérapeutique, à la fois en hypnothérapie et en sexologie. Les techniques d’autohypnose sont plus simples et plus rapides que les séances avec un thérapeute. Elles nécessitent un apprentissage et un entrainement durant quelques jours pour être maitrisées et opérantes23.

Avec un hypnothérapeute ou autohypnose ?

Les deux se complètent et aucune n’exclue l’autre, au contraire.

Si elle évite la dépendance à l’hypnothérapeute, il est néanmoins difficile de l’envisager en s’autotraitant, car le sujet aura toujours tendance à rester dans sa zone de confort. Une hypnothérapie avec un thérapeute est donc toujours souhaitable pour traiter réellement un problème spécifique, ce d’autant que certaines techniques ne sont pas applicables à soi-même.

De plus, il est préférable d’apprendre l’autohypnose avec un hypnothérapeute pour en connaître les modalités exactes. Elle doit être expérimentée et apprise avec l’hypnothérapeute et adaptée à la pratique personnelle du sujet24.

En revanche, une fois le problème résolu et la technique comprise, l’autohypnose est une pratique de choix pour amplifier de façon autonome les effets de l’hypnothérapie et en renforcer les résultats à long terme.

Que conclure ?

  • L'hypnose thérapeutique s’intègre parfaitement dans les pratiques psychocorporelles utilisées pour traiter les troubles sexuels, tant de la femme que de l’homme et peut les potentialiser.
  • Elle permet de réduire la durée des prises en charge, de diminuer la fréquence de survenue des rechutes et de majorer la satisfaction sexuelle des patients.
  • Les protocoles thérapeutiques sont relativement courts puisqu’ils vont de 5 à 10 séances, parfois moins.
  • L’hypnothérapie a fait la preuve de son efficacité et d’effets objectifs sur la physiologie du cerveau.

Questions fréquentes

L'hypnose est-elle efficace pour améliorer les troubles sexuels ?

Elle permet de réduire la durée des prises en charge, de diminuer la survenue des rechutes et d'augmenter la satisfaction sexuelle.

Que permet de traiter l'hypnose ?

- Les troubles du désir
- Le vaginisme, la sécheresse vaginale
- Les troubles de l'érection
- Les difficultés orgasmiques
- Les troubles périnéaux

Qu'en est-il de l'autohypnose ?

Elle permet d'amplifier et de renforcer, de façon autonome, les effets de l'hypnothérapie.


  • 1Simon V, Mimoun S. Comment résoudre ses problèmes sexuels grâce à l’hypnose. L’esprit du temps Ed., Paris, 2009
  • 2Baste N. Méthodes de relaxation. Dunod Ed., Malakoff, 2016
  • 3Hingray C. Hypnose médicale : quel intérêt ? Rev. Prat. MG, 2020 ; 34 : 120-121
  • 4Hingray C. Hypnose médicale : quel intérêt ? Rev. Prat. MG, 2020 ; 34 : 120-121
  • 5Simon V, Mimoun S. Comment résoudre ses problèmes sexuels grâce à l’hypnose. L’esprit du temps Ed., Paris, 2009
  • 6Mignot J et coll. Psycho-sexologie. Dunod Ed., Malakoff, 2013
  • 7Cudicio P. Sexothérapie. In Bioy A, Célestin-Lhopitaux I. Hypnothérapie et hypnose médicale. Dunod Ed., Paris, 2014
  • 8Baste N. Méthodes de relaxation. Dunod Ed., Malakoff, 2016
  • 9Benhaiem JM. L’hypnose médicale. Med-Line Ed., Paris, 2017
  • 10Simon V, Mimoun S. Comment résoudre ses problèmes sexuels grâce à l’hypnose. L’esprit du temps Ed., Paris, 2009
  • 11Mignot J et coll. Psycho-sexologie. Dunod Ed., Malakoff, 2013
  • 12Araoz D. Prise en charge des problèmes sexuels par l’hypnose. In Benhaiem JM. L’hypnose médicale. Med-Line Ed., Paris, 2017
  • 13Simon V, Mimoun S. Comment résoudre ses problèmes sexuels grâce à l’hypnose. L’esprit du temps Ed., Paris, 2009
  • 14Araoz D. Prise en charge des problèmes sexuels par l’hypnose. In Benhaiem JM. L’hypnose médicale. Med-Line Ed., Paris, 2017
  • 15Mignot J. Féminité. In Bioy A, Célestin-Lhopitaux I. Hypnothérapie et hypnose médicale. Dunod Ed., Paris, 2014
  • 16Mignot J et coll. Psycho-sexologie. Dunod Ed., Malakoff, 2013
  • 17Mignot J. Féminité. In Bioy A, Célestin-Lhopitaux I. Hypnothérapie et hypnose médicale. Dunod Ed., Paris, 2014
  • 18Mignot J. Féminité. In Bioy A, Célestin-Lhopitaux I. Hypnothérapie et hypnose médicale. Dunod Ed., Paris, 2014
  • 19Araoz D. Prise en charge des problèmes sexuels par l’hypnose. In Benhaiem JM. L’hypnose médicale. Med-Line Ed., Paris, 2017
  • 20Araoz D. Prise en charge des problèmes sexuels par l’hypnose. In Benhaiem JM. L’hypnose médicale. Med-Line Ed., Paris, 2017
  • 21Araoz D. Prise en charge des problèmes sexuels par l’hypnose. In Benhaiem JM. L’hypnose médicale. Med-Line Ed., Paris, 2017
  • 22Echevin F. Apport de l’hypnose dans la rééducation pelvi-périnéale. DU Hypnose Médicale, Université de la Réunion, 2015
  • 23Fix C. L’autohypnose. In Bioy A, Célestin-Lhopitaux I. Hypnothérapie et hypnose médicale. Dunod Ed., Paris, 2014
  • 24Fix C. L’autohypnose. In Bioy A, Célestin-Lhopitaux I. Hypnothérapie et hypnose médicale. Dunod Ed., Paris, 2014
  • 25Simon V, Mimoun S. Comment résoudre ses problèmes sexuels grâce à l’hypnose. L’esprit du temps Ed., Paris, 2009

Philippe Schwartz

Sexologue, hypnothérapeute et relaxologue. Docteur en médecine. Consulte à Reims