L’anxiété lors de la grossesse et après l’accouchement

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Selon la recherche, l’anxiété lors de la grossesse et après l’accouchement serait plus commune que la dépression post-partum. D'après une étude conduite en 2016 par la spécialiste Nichole Fairbrother, cette forme toucherait près de 15% des femmes enceintes et des jeunes accouchées. De plus amples informations sur ce trouble, ses manifestations, ses causes ainsi que sur les moyens préventifs et curatifs dont nous disposons.

Particularités

Femme enceinte représentant l'anxiété lors de la grossesse et l'accouchement.

Sentiment désagréable, il se rapproche de la peur. Face à certaines situations qui nous semblent menaçantes, se sentir anxieux est tout à fait normal. Cependant, il arrive parfois qu'elle devienne envahissante au point d’entraver la vie quotidienne : on parle alors de troubles anxieux. Dans ce cas de figure, il est indispensable d’évoquer la situation avec un professionnel de santé.

Cette période comprend de nombreux bouleversements : il est donc parfaitement normal de s’interroger ou d’être parfois préoccupé. Cet état d’esprit est loin d’être négatif puisqu’il permet à la future mère de prendre soin d’elle et du bébé, de limiter les comportements à risque… Toutefois, une anxiété très prononcée ou invalidante, pendant la grossesse ou l'accouchement, ne doit pas être minimisée. Nous recommandons aux femmes qui se trouvent dans ce cas d’aborder le sujet avec leur gynécologue, leur sage-femme ou leur médecin traitant. Ces professionnels sauront proposer un accompagnement adapté à chaque situation.

Comment se caractérise-t-elle ?

Elle se traduit bien souvent par des manifestations physiques, qui viennent s’ajouter à la sensation de mal-être psychique. Les experts du Vidal (l’ouvrage de référence qui répertorie l’ensemble des traitements médicamenteux) citent notamment des troubles du sommeil, des maux de tête, des vertiges, des tensions musculaires, des palpitations cardiaques, des tremblements, une sensation de gorge, d’estomac noué ou bien d’oppression thoracique, des troubles intestinaux, une transpiration exacerbée et même parfois, des crises de spasmophilie1.

Quelles peuvent être ses conséquences ?

Plusieurs études se sont intéressées aux conséquences potentielles de l’anxiété lors de la grossesse et après l’accouchement. Toutes ne posent pas les mêmes conclusions, toutefois, il semblerait que ce trouble augmente la survenue de certaines complications.

Une première recherche indique qu’une forme très prononcée chez la femme enceinte serait à l’origine de davantage de gestes et de soins techniques lors de l’accouchement. Les chercheurs nuancent ce résultat en précisant qu’il existe des disparités selon qu’il s’agisse d’un premier enfant ou non2.

Une méta-analyse publiée un an plus tard conclue quant à elle que l’anxiété lors de la grossesse accroît les risques de naissance et d'accouchement prématuré et de faible poids du bébé. Les auteurs expliquent en outre ne pas avoir constaté d’association significative avec la survenue d’une prééclampsie, d’un accouchement par césarienne ou encore d’un faible score d’Apgar3.

Enfin plusieurs études évoquent le lien existant avec les troubles du développement chez l’enfant4 5.

Pour quelles raisons l’anxiété peut-elle survenir lors de la grossesse et après l’accouchement ?

Période prénatale

Lorsque la grossesse est désirée ou programmée, elle apporte une grande joie aux futurs parents. Toutefois, cette période ne comporte pas uniquement des moments de bonheur et de sérénité. Les incertitudes peuvent tout à fait entraîner un sentiment d’angoisse passagère. Elle doit ainsi pouvoir s’estomper, sans nuire au quotidien de la femme enceinte.

En outre, une étude signale que l’anxiété qui survient lors du pré-partum est majoritairement liée au devenir du fœtus ou de la mère elle-même. Ainsi, liée à des causes plus générales ou bien, à une dépression, elle serait plus rare6. Voici les appréhensions les plus couramment rencontrées.

La perte du bébé ou la survenue d’un problème de santé chez ce dernier

Il est tout à fait normal que la santé du fœtus préoccupe la femme enceinte. Cependant, pour certaines futures mères, cet aspect incarne une véritable source d’angoisse. Mentionnons que les femmes qui ont des antécédents d’infertilité, de fausse couche ou d’accouchement prématuré peuvent être davantage touchées par cette appréhension.

Parfois, ce sont les divers examens médicaux qui génèrent une telle angoisse. Prenons l’exemple du dépistage de la trisomie 21. Si les futurs parents décident de réaliser ce test, il faut compter en moyenne 10 jours pour connaître les résultats7. Pour certaines personnes, cette période s’avère anxiogène.

La crainte des changements physiques

Certaines femmes enceintes appréhendent tout particulièrement les changements physiques : une prise de poids plus ou moins importante, une modification de la silhouette, l’apparition de vergetures, d’un masque de grossesse… Ces dernières ont tendance à s’inquiéter de ne pas parvenir à retrouver leur corps d’avant et de moins plaire à leur conjoint.

L’accouchement

La plupart des femmes se questionnent ou s’inquiètent, à l’approche du terme : vais-je savoir à quel moment faut-il partir pour la maternité, vais-je réussir à gérer la douleur des contractions puis à pousser correctement, l’accouchement va-t-il bien se passer ?

Lorsqu’il s’agit d’une première grossesse, la future mère craint généralement la part d’inconnu présente lors de l’accouchement, ce qui génère de l'anxiété ; le fait de ne pas pouvoir maîtriser totalement les événements. Les femmes qui ont auparavant vécu un accouchement difficile peuvent quant à elles appréhender que cette situation se répète. Et comme chaque naissance est différente, l’inconnu peut également les angoisser.

De surcroît, il n’est pas rare d’entendre des proches faire le récit d’accouchements difficiles. Lorsque la perspective de l’accouchement se rapproche, ces propos peuvent renforcer l’angoisse des futures mères.

La nouvelle vie avec bébé

L’anticipation d’un quotidien nouveau, dans lequel un nouveau-né est à prendre en charge, préoccupe également les femmes enceintes. Certaines redoutent de ne pas être à la hauteur de ces responsabilités inédites, alors que d’autres craignent de ne pas parvenir à tisser un lien parent-enfant optimal.

Période post-natale

Caractéristiques

Ça y est, bébé est là : il apporte avec lui beaucoup de bonheur et dans le même temps, bouleverse les habitudes et le quotidien des jeunes parents. Outre la fatigue liée à la grossesse et à l’accouchement et aux nuits raccourcies, la mère doit, avec l’autre parent, répondre aux besoins du nouveau-né ; ce qui peut générer de l'anxiété. Les nombreux soins à apporter à ce dernier peuvent générer de l’appréhension, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’une première naissance. Parfois, cette préoccupation normale se transforme en véritable peur envahissante de ne pas disposer des compétences nécessaires pour prendre soin de son bébé.

Bon à savoir

L’anxiété post-partum, suite à la grossesse et à l'accouchement, est à différencier du baby blues. Le baby blues (également appelé post-partum blues ou maternity blues) correspond à un bouleversement émotionnel non pathologique, vécu par la majorité des jeunes accouchées. Cet épisode transitoire survient quelques jours après la naissance et dure habituellement de quelques heures à 5 jours.

En règle générale, le baby blues se manifeste par le sentiment de ne pas être capable de s’occuper de son bébé en association avec une humeur changeante, des pleurs, des troubles du sommeil ainsi qu’un état de fatigue. Si les symptômes du post-partum blues sont invalidants ou s’ils s’étendent au-delà de la première semaine, il est recommandé de consulter un professionnel de santé8.

Quelles sont les solutions à mettre en place ?

Lors de la grossesse et de l’accouchement, diverses ressources existent pour prévenir l’anxiété ou bien lutter contre ce trouble.

Compter sur son entourage

Nous évoquions précédemment les proches qui, au travers de récits négatifs sur cette période de la vie, génèrent de l'inquiétude. Certains peuvent, au contraire, rassurer et épauler la future mère, en adoptant une attitude bienveillante. Il ne faut pas hésiter à dialoguer davantage avec ces derniers.

Après la naissance, certaines jeunes mères craignent de se sentir dépassées par leur nouveau rôle, leurs nouvelles responsabilités. Dans ce cadre, demander de l’aide à certaines personnes de confiance s’avère particulièrement bénéfique. En effet, ces dernières peuvent prendre le relai avec bébé et contribuer aux tâches ménagères. De plus, les proches qui viennent aider les jeunes parents sont souvent très heureux de se rendre utiles, et d’apprendre à connaître le nouveau membre de la famille.

S’informer

Se renseigner sur les étapes de la grossesse ou sur les premiers moments de vie du nouveau-né apaise généralement les futures mères. Les professionnels de santé (gynécologue, sage-femme, médecin traitant…) incarnent des interlocuteurs privilégiés, disponibles pour répondre à toute question relative à la maternité.

Par ailleurs, plusieurs temps d’accompagnement à la parentalité sont proposés et pris en charge à 100% par l’Assurance Maladie.

Un premier rendez-vous peut être prévu à partir du 4ème mois. Il s’agit de l’entretien prénatal précoce (EPP) au cours duquel les futurs parents abordent avec la sage-femme le projet de naissance, leurs interrogations ou bien une éventuelle difficulté. Cet EPP permet d’orienter, si nécessaire, la future mère vers un autre professionnel de santé, et notamment, un psychologue.

Les femmes enceintes bénéficient en outre de 7 séances de préparation à la naissance et à la parentalité, durant lesquelles de nombreux thèmes sont traités : techniques de respiration et de relaxation, accouchement, allaitement, suites de couche, soins du nouveau-né…

Après la naissance, le suivi du bébé débute, permettant aux parents de poser toutes leurs questions. La jeune mère fait également l’objet d’un suivi, via la consultation post-natale et les séances de rééducation périnéale.

Prendre soin de soi au quotidien

Adopter un mode de vie sain va contribuer à limiter l’anxiété lors de la grossesse et après l’accouchement.

L’alimentation

Il est tout d’abord recommandé d’accorder une attention particulière à son alimentation. Varié et équilibré, le régime alimentaire doit apporter tous les nutriments nécessaires à l’organisme de la femme enceinte, au fœtus, puis, à la mère allaitante et au nouveau-né. Mentionnons qu’il est conseillé d’éviter la caféine. Présente dans le café, les boissons énergétiques ou les sodas, cette substance pourrait augmenter ce trouble9.

Le sommeil

Lorsque l’on souffre d’anxiété, des troubles du sommeil peuvent apparaître au cours de la grossesse et après l'accouchement. D’une manière plus générale, le manque de sommeil se fait souvent ressentir avec un nouveau-né à la maison. La mise en application des préconisations de l’Institut National du Sommeil et de la Vigilance (INSV) peut aider les (futures) mères à mieux dormir10.

L’exercice physique

Les professionnels de santé encouragent les femmes enceintes à pratiquer une activité physique modérée et compatible avec cette période, dans la mesure où elles ne présentent aucune contre-indication (pathologie cardiaque, pulmonaire ou gravidique)11. D’une manière globale, le sport est effectivement connu pour accroître et le bien-être12. Notons que certaines pratiques sportives sont déconseillées aux débutantes, en raison des risques qu’elles comprennent (notamment coups et chutes). Cependant, il est tout à fait possible de s’initier à diverses activités, comme le yoga prénatal. La recherche considère en outre que cette pratique est particulièrement bénéfique pour lutter contre l’anxiété pendant la grossesse13.

Après la naissance, la reprise du sport peut avoir lieu de manière progressive, dès lors que le médecin, le gynécologue ou la sage-femme donne son aval. C’est l'occasion parfaite pour prendre du temps pour soi !

Consulter un psychologue

Les professionnels qui suivent les femmes lors de la grossesse et après l'accouchement peuvent, en cas d’anxiété, recommander l’intervention d’un psychothérapeute. Véritable traitement de fond de ce trouble, la psychothérapie donne de très bons résultats. Il est à noter que la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) serait particulièrement efficace pour les femmes14.

Prendre un traitement médicamenteux

Le médecin ou le psychiatre peut être amené à prescrire un traitement médicamenteux à une femme enceinte ou allaitante qui souffrirait d’une forme très sévère de troubles anxieux. En effet, la recherche a montré que certains anxiolytiques et antidépresseurs ne présentent pas ou peu de risques pour le fœtus, notamment à compter du 2ème trimestre 15. Le professionnel de santé prend en compte tous les bénéfices et tous les risques d’une telle prescription et en informe la (future) mère. Cette dernière pourra ainsi prendre sa décision de manière éclairée.

Opter pour une supplémentation naturelle

De nombreux compléments alimentaires, médicaments homéopathiques ou produits de phytothérapie sont connus pour lutter contre l’anxiété, notamment pendant la grossesse ou lors de l'accouchement. Ces derniers se trouvent en vente libre. Toutefois, il convient d’être particulièrement vigilant, notamment lors de l’allaitement, et de se référer systématiquement à un professionnel de santé avant toute prise.


  • 1Vidal (2019) Les symptômes et les causes de l’anxiété.🔗 https://www.vidal.fr/maladies/psychisme/anxiete/symptomes-causes.html
  • 2Koelewijn JM. & al. (2017) Possible relationship between general and pregnancy-related anxiety during the first half of pregnancy and the birth process : a prospective cohort study. BMJ Open.
  • 3Grigoriadis S. & al. (2018) Maternal Anxiety During Pregnancy and the Association With Adverse Perinatal Outcomes : Systematic Review and Meta-Analysis. Journal of clinical psychiatry.
  • 4Polte C. & al. (2019) Impact of Maternal Perinatal Anxiety on Social-Emotional Development of 2-Year-Olds, A Prospective Study of Norwegian Mothers and Their Offspring : The Impact of Perinatal Anxiety on Child Development. Maternal child health journal.
  • 5Mughal MK. & al. (2018) Trajectories of maternal stress and anxiety from pregnancy to three years and child development at 3 years of age : Findings from the All Our Families (AOF) pregnancy cohort. Journal of affective disorders.
  • 6Bayrampour H. & al. (2016) Pregnancy-related anxiety : A concept analysis. International journal of nursing studies.
  • 7Haute Autorité de Santé (2018) Le dépistage de la trisomie 21.
  • 8Jalenques I. & Legrand G. (2009) Blues et dépression du post-partum. La revue du praticien.
  • 9Richards G. & Smith A. (2015) Caffeine consumption and self-assessed stress, anxiety, and depression in secondary school children. Journal of psychopharmacology.
  • 10Site de l’INSV.🔗 https://institut-sommeil-vigilance.org/10-recommandations-de-nos-experts-pour-bien-dormir/
  • 11Kagan KO. & Kuhn U. (2004) Sports and pregnancy. Herz.
  • 12McMahon EM. & al. (2017) Physical activity in European adolescents and associations with anxiety, depression and well-being. European child & adolescent psychiatry.
  • 13Babbar S. & Shyken J. (2016) Yoga in Pregnancy. Clinicals obstetrics and gynecology.
  • 14Nechita D. & al. (2018) A review of the influence the anxiety exerts on human life. Romanian Journal ofMorphology & Embryology.
  • 15Salesse-Gauthier E. & Richard C. (2017) Dépression ou troubles anxieux pendant une grossesse et absence de traitement : et si on parlait des risques ? Perspective infirmière.
Mélanie Manzanares

Rédactrice spécialisée dans le domaine de la santé, ayant obtenu le diplôme d'état infirmier en 2013.